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La GALE : un mouvement antifa lyonnais violent qui refuse sa dissolution
Créé en 2013, le Groupe antifasciste Lyon et Environs, dit la GALE, fut l’un des groupes antifasciste les plus importants de la métropole de Lyon. Il a été dissout en octobre 2023, après une bataille acharnée avec le Conseil d’État, et porte à présent l’affaire devant la Cour européenne des droits de l’homme. La GALE n’a pas pour autant cessé ses activités, et continue à être active sur les réseaux sociaux, sans parler de l’organisation du Lyon antifa Fest et de la promotion d’un livre racontant son parcours.
En 2013, Clément Méric est tué lors d’une rixe entre l’extrême gauche et l’extrême droite. Cet événement agit comme un catalyseur pour l’extrême gauche dans toute la France et encourage notamment des antifas lyonnais à fonder le Groupe antifasciste Lyon et environs (GALE), qui réunit à l’époque plusieurs groupuscules. La GALE réunira un noyau dur d’une petite trentaine de personnes. Ses militants ont pour la plupart entre 20 et 30 ans. Le mouvement revendique un fonctionnement horizontal, sans dirigeant, et ne déclare d’ailleurs aucun responsable. Il était donc considéré comme un « groupement de fait ». Pendant un peu moins de dix ans, la GALE fera donc la chasse à « l’extrême droite » dans Lyon, en tenant particulièrement son fief de la Guillotière. De nombreux militants y vivent et la GALE y a tenu le squat de l’ECG.
À l’origine de la GALE, des groupuscules violents
Avant la naissance de la GALE, plusieurs groupuscules d’extrême gauche existaient à Lyon. Certains antifascistes venaient du SCALP, la Section Carrément Anti Le Pen, qui cesse d’exister dans les années 2000, d’autres des Voraces, un groupe localisé près de la Croix-Rousse, un quartier lyonnais. On peut également citer la Rafale. Tous ces antifascistes évoluaient autour de la librairie La Plume Noire, qui abrite un groupe communiste-libertaire, du bar La Fourmu Rouge devenu La Pite douce, ou du bar De l’autre côté du Pont, dans le quartier de la Guillotière. Des lieux emblématiques de l’extrême gauche. Ces électrons libres vandalisent les lieux où se déroulent des conférences qui ne leur conviennent pas et attaquent les militants nationalistes dans des manifestations. S’y ajouteront des réseaux des mouvances punk, rap militant et Oï, des militants autonomes, des syndicalistes et des membres de certains partis politiques, notamment le NPA.
La GALE est d’abord constituée de personnes violentes qui veulent casser, tabasser, se battre. Ainsi, un témoin explique dans Fragments d’une lutte antifasciste avoir voulu rejoindre le NPA. « À la première réunion, on a passé notre temps à amender un texte national, c’était plus chiant que l’école. Si on avait une initiative, il fallait passer par la commission truc, et si la commission machin validait pas, ça ne marchait pas, ça m’a frustré ! Je ne pensais pas qu’on allait tout de suite fabriquer des Molotov, mais j’imaginais quand même voir des gens un peu dans l’action ! » Certains militants cumulent tellement de condamnations qu’en certaines occasions, ils ne peuvent pas manifester de peur d’être à nouveau arrêtés et, cette fois, à une peine importante.
Une tradition du squat bien ancrée
Comme de nombreux groupes d’extrême-gauche, la GALE utilise de nombreux squats, et parfois les anime. Ses membres fréquentent notamment l’Oblik, une usine désaffectée à Villeurbanne occupée par le collectif la Travers. Les 10 000m² désaffectés de cette usine offraient une place de choix pour des activités musicales, cinématographiques, sportives, associatives des sports de combat ou du jardinage. Comme souvent, les militants d’extrême gauche revendiquent la mise en relation de différents milieux. En effet, les militants, souvent étudiants à l’université, côtoient des sans-abris ou des réfugiés.
Squatter des lieux non-sécurisés et y pratiquer des activités inadaptées représentent cependant des risques que les pouvoirs publics ne sont pas prêts à courir. Les murs de l’Oblik contenaient notamment de l’amiante et les bâtiments n’étaient pas conçus pour les détections incendies. Sans même parler des nuisances sonores, visuelles, voire olfactives, qui accompagnent toujours les squats. En l’occurrence, les responsables de l’Oblik ont été assignés en justice le 4 avril 2016, après plusieurs mois d’occupation, et ont perdu leur procès le 25 avril. Les squatteurs feront donc venir des familles de réfugiés pour tenter d’infléchir la décision du tribunal, sans succès.
2013 : la mort de Clément Méric
Le 5 juin 2013, Clément Méric meurt et certains partis de gauche, comme le NPA et le PS, lui rendent hommage. Cela ne plaît pas aux militants antifascistes qui voient cet hommage comme une récupération. Ils font irruption dans un rassemblement organisé par la gauche avec des fumigènes et poursuivent le maire de Lyon, Gérard Colomb, qui devra être exfiltré par la police. C’est cette action, et la manifestation sauvage qui a suivi, qui marque la création de la GALE. Le groupe organise des conférences, des projections, des concerts, à La Plume noire et dans des squats. La première action officielle sera une contre-manifestation à Oullins. Cette ville doit accueillir un centre d’accueil pour sans-abris, en l’occurrence principalement Roms. François-Noël Buffet, maire UMP d’Oullins, organise un rassemblement contre ce centre d’accueil. La GALE s’y rend et est chassée par la police.
2014-2022 : une succession d’agressions
Lyon est considéré par la gauche comme une ville noyautée par l’extrême droite. La GALE a donc eu à cœur d’agresser tous les militants qu’elle pouvait rencontrer, quel que soit le cadre de la rencontre. Ainsi, en juin 2014, deux militants de la GALE se trouvent sur la place de la Fosse aux Ours un soir de la coupe du monde. Ce soir-là, l’Algérie a gagné et les forces de l’ordre ont fort à faire pour canaliser les supporters. Damien Rieu et Maxime Gaucher sont sur place pour filmer la soirée et montrer le comportement des supporters algériens sur les réseaux sociaux. Ils seront durement frappés par les membres de la GALE, qui s’en vanteront dans Fragments d’une lutte antifasciste, livre relatant les exploits de la GALE publié en 2024. Les manifestations organisées sont lourdement armées et s’en prennent aux partis de droite, aux forces de l’ordre, aux établissements commerciaux et bancaires. En d’autres occasions, les militants de la GALE agressent des « fafs » hors cadre politique, notamment sur des terrasses.
Le 10 avril 2018, des militants murent l’ancien local du Bastion Social, organisation nationaliste-révolutionnaire dissoute en 2019. En plus du local lui-même, certains espaces comme le local poubelle de l’immeuble seront dégradés, et ce sont les habitants eux-mêmes qui paieront la note. Le 13 novembre 2018, six personnes accusées de ce vandalisme sont perquisitionnées. Après une garde-à-vue de quarante-huit heures, ils sont mis en examen, puis sous contrôle judiciaire pendant deux ans.
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La GALE se fait également une spécialité d’exclure les organisations de droite des manifestations apartisanes, notamment dans les manifestations de Gilets Jaunes. Elle prend part à de nombreux affrontements contre des militants nationalistes.
Après les Gilets Jaunes, les manifestations populaires importantes seront les événements anti-pass. Or, à ce moment-là, les manifestations sont doubles et ne se croisent pas, ce qui évite les affrontements sur fonds d’opposition politique. Toutefois, la GALE rencontrera l’extrême droite en une occasion, ce qui débouchera sur un procès. Le 28 août 2021, plusieurs antifas se battent contre trois militants de Civitas à l’occasion de l’une de ces manifestations. Le 4 novembre, sept militants de la GALE sont jugés. Quatre d’entre eux avaient été placés en détention provisoire auparavant. A cause d’une erreur dans les scellés, la vidéo-surveillance de la rixe ne peut pas être visionnée. Le procès en est compliqué, trois membres de la GALE sont relaxés et les quatre autres écoperont de peines mineures.
2022 : la GALE s’est-elle attaquée à trop fort pour elle ?
En janvier 2022, la GALE s’attaque non plus à des groupes dits d’extrême-droite, mais à un groupe pharmaceutique et agroalimentaire, Bayer, géant allemand ayant son siège dans le 9e arrondissement de Lyon. La GALE relaie l’« ultimatum » des Soulèvements de la Terre via son compte Twitter. « Nous leur laissons trois mois pour faire leurs cartons et déguerpir de leur tour de verre, et d'ici-là nous saurons le leur rappeler » écrivaient-ils. Si Bayer n’obtempérait pas, son bâtiment devait être « assiégé » le 5 mars 2022. Entre les précédents faits d’armes de la GALE et l’attaque d’Extinction Rébellion en mars 2021, le groupe avait toutes les raisons de prendre la menace au sérieux. C’est peut-être ce qui a motivé la dissolution de la GALE, dont la procédure commence quelques semaines plus tard.
Toutefois, il faut également citer une attaque de la GALE contre la police, en mars 2022. La GALE avait collé dans les 3e et 7e arrondissements de Lyon des affiches présentant la police en habit du Ku Klux Klan. Une action qui avait fortement déplu aux représentants de l’ordre, y compris de gauche. Le syndicat FO Police municipale avait accusé la GALE d’être devenue « ce que vous imaginiez combattre » et avait rappelé à l’adjoint municipal à la sécurité que « les extrêmes doivent être muselées. Toutes les extrêmes. » Ce qui fut fait.

La haine de la police est dans l’ADN de la GALE depuis sa création, ce qui est d’ailleurs intrinsèque à l’extrême gauche. Dans Fragments d’une lutte antiterroriste, livre qui rassemble plusieurs témoignages de la GALE, l’un des témoins raconte qu’en 2014, des supporters fêtaient la victoire de l’Algérie pendant un match de coupe du monde, et que « vu que c’était des supporters algériens, la police chargeait et balançait du gaz ».
Mars 2022 : la dissolution
Une première depuis quarante ans
En mars 2022, la GALE est dissoute. C’est sans doute l’une des années les plus denses de ce groupe. La GALE est le premier groupe d’extrême gauche à être dissous depuis quarante ans. Le dernier en date était le groupe Action directe, dissous à la fin des années 80. Action directe avait notamment revendiqué l’assassinat de Georges Besse, PDG de la Régie Renaud, et René Audran, ingénieur de l’armement. Le rapport avec ce groupe réjouit peut-être la GALE car elle a publié un visuel de soutien à Jean-Marc Rouillan, militant d’Action Directe condamné pour les assassinats susmentionnés. Ce dernier posait devant le drapeau de la GALE et le texte « Non à l’acharnement judiciaire – l’état (sic) veut réincarcérer Jean Marc Rouillan » était apposé sur l’image.
Un nouvel usage de la loi séparatisme
Pour la dissolution de la Gale, le ministère de l’Intérieur a utilisé la loi séparatisme, qui a étendu le champ d’application de l’article L212-1. En 1934, cet article interdit les « associations qui provoquent des manifestations armées », visant à l’époque des ligues nationalistes. En 2021, la loi séparatisme étendra le champ d’application de cette loi aux « agissements violents à l’encontre des personnes ou des biens ». Cette deuxième version vise notamment les black blocs et permet de dissoudre tant les associations que les groupements de faits. La dissolution de la GALE s’est uniquement fondée sur cet article L212-1.
Pourquoi le Conseil d’État a suspendu la dissolution
Lorsque la GALE apprend, le 17 mars 2022, qu’elle est sous le coup d’une procédure de dissolution, sa réaction ne se fait pas attendre. Que ce soit devant la justice ou les réseaux sociaux, elle est présente. Sur X, la GALE interpelle notamment le ministre de l’Intérieur de l’époque en ces mots : « Gérald Darmanin, tu ne veux pas la guerre, mais pourquoi tu allume (sic) la mèche ? » Côté judiciaire, les avocats de la GALE envoient en urgence un référé-liberté au Conseil d’État pour contester cette décision. En effet, l’élection présidentielle approche et la GALE compte bien mener de nombreuses actions. Le 16 mai, le Conseil d’État suspendra la décision de dissolution au motif que « les éléments retenus contre le groupement, pris tant isolément que dans leur ensemble, ne justifient pas sa dissolution au regard du code de la sécurité intérieure ». Ainsi, les juges ont estimé douteux que les faits de violence indiqués dans le dossier de dissolution aient été motivés par les actions de la GALE. Selon eux, le groupe n’a pas appelé à commettre des actions violentes.
Subtil et plein d’humour : comment la GALE se défendait
Face au Conseil d’État, les avocats de la GALE et son leader supposé, à tout le moins son fondateur, Axel Festas, ont tenté de montrer que la GALE n’avait rien d’un mouvement violent. On reprochait ainsi au groupe d’extrême gauche une publication Facebook racontant une manifestation avec une « bataille » entre les manifestants et les forces de l’ordre, « une pluie d’œufs et de peinture rose » qui « s’abat sur les flics » et la brigade anti-criminalité (BAC) qui « repart en courant sous une pluie de bouteilles et de pavés ». La GALE se réjouissait de cet affrontement en souhaitant à ses abonnés un « joyeux ACAB day ». Pour Axel Festas, cette publication est un « récit » « fait avec une pointe d’humour ». Pour maître Antoine Lyon-Caen, avocat de la GALE devant le Conseil d’État, l’acronyme ACAB (all cops are bastard, tous les flics sont des bâtards) « n’est pas une injure ». Il s’agirait plutôt de souligner une certaine dichotomie entre le métier du policier qui intervient dans un quartier populaire et sa naissance dans ce même quartier. Une « invention subtile » à en croire l’avocat.
À l’issue d’une bataille aussi bien judiciaire que médiatique, le Conseil d’État suspendra la dissolution de la GALE au motif que « Si la GALE a relayé sur ses réseaux sociaux des appels à participer à des manifestations, le groupement n’a pas été à l’origine de ces appels. » Si la gauche se félicitera de ce qu’elle nommera une victoire pour la liberté d’expression, d’autres s’inquièteront de ce blanc-seing donné à la gauche pour donner de la visibilité à des contenus violents, du moment que l’on n’en est pas « à l’origine ».
Novembre 2023 : clap de fin pour la GALE
En novembre 2023, le Conseil d’État change son fusil d’épaule. Il confirme finalement la dissolution de la GALE et précise le champ d’application de la loi séparatisme. Ainsi, « une dissolution est justifiée si une organisation incite, explicitement ou implicitement, à des agissements violents de nature à troubler gravement l’ordre public. Peut constituer une telle provocation le fait de légitimer publiquement des agissements d’une gravité particulière ou de ne pas modérer sur ses réseaux sociaux des incitations explicites à commettre des actes de violence. »
Le Conseil d’État rappelle notamment que la GALE « a publié des images de violences à l’encontre de policiers, accompagnées de textes haineux et injurieux, ou encore des messages approuvant et justifiant des violences graves envers des militants d’extrême-droite, entraînant des appels à la violence que le groupe n’a pas tenté de modérer. » Il ne suffit donc plus d’être à l’origine d’appels à la violence pour être menacé de dissolution, et les avocats de la GALE s’inquièteront de l’avenir de nombreux groupes politiques avec cette nouvelle interprétation.
Malgré la dissolution, la GALE a manifesté le soir même... contre celle-ci. Dans les médias, elle affirmait d’ailleurs que ses militants continueraient la « lutte antifasciste ».
Les militants
L’extrême gauche est passée maître dans l’art de dissimuler ses membres, et il n’est donc pas toujours facile de les désigner. Toutefois, les procès permettent d’en faire sortir certains du bois.
Axel Festas est l’un des fondateurs de la GALE, et il en conteste la dissolution devant le Conseil d’État. Il se fera d’ailleurs appeler « Alex F. » lors du procès. Il a été condamné plusieurs fois pour des faits de violence impliquant la GALE. L’Observatoire s’intéressera à son profil dans une prochaine enquête.
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Florent, alias Côme dans Fragments d’une lutte antifasciste, est le chef supposé de la GALE. Il en a reçu la notification de dissolution de la part de la justice. On trouve également Lucas, étudiant en droit, ou Lamia, pour qui la dissolution de la GALE est un coup politique destiné à flatter l’extrême droite. Les membres de la GALE trouvent en effet le dossier de dissolution léger et peu propice à justifier la décision du gouvernement.
Parmi les autres membres de la GALE se trouve Nassim, qui possède une Yamaha roadster blanche.
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Mehdi, qui est impliqué dans l’agression des militants de Civitas.
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Également impliqué dans l’agression des militants de Civitas, Toninho, âgé de plus de cinquante ans, réputé pour être aux côtés du noyau dur à chaque manifestation.
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Tomas Ferrer Semper était encore en 2024 le leader de la nouvelle génération d’antifas de la GALE. Cet étudiant en bac pro Bois au lycée La Mache a participé à de nombreux actions violences avec ses comparses.
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Tom, vingt-et-un an, est également antifa à la GALE. Il travaille au bar Hopstore.
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Safiya Bajja, elle, est une tête importante de la GALE. De nationalité italienne, elle a saisi la CEDH contre le gouvernement français et est la femme de Axel « Grekos » Festas.
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La GALE, une dynastie familiale ? Dans les cadres, il est également possible de retrouver Maëlle Festas, la sœur d’Axel et la belle-sœur de Safiya. Elle est orthophoniste et, comme son frère et sa belle soeur, elle a attaqué la France devant la CEDH.
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Plus encore, il y a dans les rangs de la GALE Noé Leloutre, dit Flash, qui s’est fait connaître dès ses seize ans, en 2020, lorsqu’il a pris un tir de LBD dans le visage durant une manifestation des Gilets Jaunes à Lyon alors que le black bloc, composé de militants de la GALE notamment, tentait une charge.
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Autre militant encore très actif dans le petit monde de la GALE, Martin Labbé. Cet assistant commercial chez Watts Up Group, actuellement en bachelor deuxième année approfondissement sport & business à l’Idrac Business School est un proche de Grekos et participe à toutes les actions des antifas.
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La GALE compte également dans ses rangs « Lino », « Yass », « Tony », Lyna Mahdia, Laurent Abecassis, Thimoté Serve, Hugo Ladkar (un historique de la GALE), Karen, Éva Barte (elle cumule au moins trois condamnations), Met Dijane, Élisa Duverget (qui a fait des études d’osthéopathie), Samuel Diare (qui est ou qui était en concubinage avec Élisa Duverget), Sophia Mindsounz (membre de l’organisation du Lyon Antifa Fest), etc.
Les avocats
Olivier Forray est l’un des avocats de la GALE les plus virulents, et les plus présents dans les médias. Ainsi, il s’inquiète à l’occasion de la dissolution de la GALE d’une extension de la loi séparatisme qu’il trouve « fourre-tout ». « Quelles sont ses limites, et sa portée ? Jusqu’ici, c’était impossible de dissoudre un groupe de gauche, car la lutte armée ou la discrimination, les motifs les plus fréquents de dissolution, sont antithétiques avec les valeurs que ceux-ci portent. Mais un “appel à la violence”, c’est difficile à interpréter », explique-t-il en des termes avec lesquels bon nombre de victimes de l’extrême gauche ne seront probablement pas d’accord.
Selon Olivier Forray, le problème de l’extension de la loi séparatisme est aussi le concept de la violence sur des biens. « Les agissements violents contre les biens, ça n’existe pas. On peut dégrader un bien, et on peut être violent contre une personne, c’est tout. Cette loi introduit une notion qui n’existe pas, ce qui crée une insécurité juridique majeure, puisqu’il devient impossible de connaître le champ d’application de la loi. »
Agnès Bouquin est également l’un des avocats de la GALE. Selon elle, avec sa dissolution, « c’est l’idée même de la désobéissance civile qui est criminalisée par cette décision, très attentatoire à la liberté d’association ». Une défense qui rejoint celle de maître Olivier Forray, mais également celle d’Antoine Lyon-Caen, avocat représentant de la GALE au Conseil d’État. Ce dernier affirmait que « d’un point de vue des libertés publiques, cet article est beaucoup trop souple. Si on l’interprète comme le ministère de l’Intérieur est en train de le faire, s’en est tout simplement fini du droit de manifester ».
Les soutiens
Lorsque la GALE s’est trouvée sous le coup d’une procédure de dissolution, de nombreux militants et sympathisants d’extrême gauche se sont réunis à ses côtés. Leïla, membre du comité de soutien de la GALE, s’est notamment indignée auprès de l’AFP que ce groupe soit mis « sur un même pied d’égalité » que Génération identitaire, dissous en 2021, alors qu’il s’agissait d’un groupe « raciste, prônant la haine et n'hésitant pas à passer à l'acte lors de maraudes. »
Du côté des associations, on trouve dans l’entourage de la GALE les Soulèvements de la Terre, dont l’ultimatum contre Bayer est relayé par la GALE, mais aussi le syndicat Solidaires, Révolution Permanente ou encore l’Action antifasciste Grenoble, qui publient un communiqué de soutien en réponse à la procédure de dissolution. Certains médias gratifieront également la GALE d’articles louangeurs, notamment Basta !, Rue89, Médiapart et France culture.
Dans ce dernier média, l’auteur de l’article soutenant la GALE est Olivier Minot. Ce journaliste a publié un reportage relatant la bataille entre Civitas et la GALE, ainsi que Fragments d’une lutte antifasciste, en octobre 2024, où il raconte la « répression des forces de l’ordre » subie par les militants antifascistes. Le reportage « l’affaire des sept antifas » est largement reconnu par la GALE, qui se dit touchée « par sa volonté de rendre audible un discours antifasciste à un public large ».
Sur le blog de Médiapart se trouvent également deux tribunes de soutien à la GALE. La première dans son procès pour l’agression des membres de Civitas, la deuxième dans sa procédure de dissolution. On y trouve le Syndicat de la Magistrature ainsi que de nombreux avocats : Sonia Akue, Arié Alimi, Vincent Brengarth, Agnès Bouquin, Mireille Damiano, Emmanuel Daoud, Sylvain Debray, Alexandre Derksen, Sylvain Dubray, Amandine Fabregue, Nicolas Fanget, Olivier Forray, Manuela Grevy, Anis Harabi, Sarah Just, Raphaël Kempf, Carine Monzat, Aïnoha Pascual, Lisa Pagani, Matthieu Quinquis, Florian Regley, Cécile Ritouet, Muriel Ruef, Rémi Ruiz, Bettina Sacepe, Vincent Ubeda, Sophie Allaert, Florence Alligier, Judith Bazin, Carole Bazzanella, Michèle Blanc, Antoine Bon, Nohra Boukara, Coline Bouillon, Vincent Brengarth, Lionel Crusoe, Benoit David, Adeline Dubost, Nicole Foulquier, Clara Gandin, Jean-Jacques Gandini, Zoé Guilbaud, Mohamed Jaite, Fayçal Kalaf, Amid Khallouf, Frantz Koskas, Christophe Le Grontec, Janaïna Leymarie, Virginie Levert, Albert Levy, Cécile Linossier, Juliette Louedec, Elasa Marcel, Caroline Mecary, Hélène Melmi, Yolanda Molina Ugarte, Carine Monzat, Hugo Partouche, Bastien Poix, Xavier Sauvignet, Karine Shebabo.
Les deux tribunes ont également été signées par des intellectuels, qui s’agissent de professeurs, d’universitaires, de sociologues et autres experts, etc. Il s’agit de Jean-Christophe Angaut, Eric Aunoble, Ludivine Bantigny, Arnaud Beal, Miguel Benassayag, Pierre Bernat, Sophie Beroud, Saïd Bouamama, Paul Boino, Taha Bouhafs, Ahmed Boubeker, Anne-Sophie Chambost, Philippe Corcuff, Enzo Cormann, Nicolas Da Silva, Sonia Dayan-Herzbrun, Laurence de Cock, Sophie Desrosiers, Nicolas Dessaux, Keith Dixon, Emmanuel Dockes, Montserrat Emperador Badimon, Jules Falquet, Eric Fassin, Fanny Gallot, Isabelle Garo, Franck Gaudichaud, Ariane Ghirardello, Gunter Gorhan, Frédéric Grimaud, Samuel Hayat, Odile Helier, Tomás Ibáñez, Chantal Jaquet, Michel Kokoreff, Stathis Kouvelakis, Memphis Krickeberg, Simon Le Roulley, Frédéric Lordon, Lilian Mathieu, Pascale-Marie Milan, Hugo Montero, Olivier Neveux, Julien O'miel, Ugo Palheta, Willy Pelletier, Marie Plassart, Thibaut Rioufreyt, Marcel Roelandts, Karine Roudier, Max Sanier, Serge Slama, Alessandro Stella, Julien Talpin, Daniel Thin, Julien Thery, Enzo Traverso, Patrick Vassort, Christiane Vollaire, Jean-Claude Zancarini, Michelle Zancarini-Fournel, Jean Agnes, Vanessa Codaccioni, Didier Fassin, Barbara Glowczewski, Isabelle Krzywkowski, Geoffroy de Lagasnerie, Mathilde Larrere, Olivier Long, Alain Parrau, Julien Salingue, Dimitrios Scarpalezos, Fabien Tarrit, Romain Telliez. On peut enfin citer Matthieu Perré, éditeur.
On trouve également parmi les signataires des militants et membres de syndicats et de partis politiques : Dimitra Antonopoulou, Adrien Cornet (CGT Total), Cédric Herrou, Daniel Aptekier-Gielibter, membre du bureau du RAAR (Réseau d’actions contre l’antisémitisme et tous les racismes), Geneviève Bernanos, Collectif des mères solidaires et réseau international des mères antifascistes (RIMAF), Albert Herszkowicz, président de Memorial 98, Giorgos Kalaitzidis, Anasse Kazib, Pia Klemp, Nicolas Krameyer, Geneviève Legay, Aracely Leon Medina, Mathieu Rigouste, Maud Rivière, Sébastien Tuller, Olivier Besancenot (NPA), Adrien Cornet (CGT Grandpuits), Gaétan Gracia (CGT Ateliers de Haute-Garonne), Georges Gumpel (Union juive française pour la paix – Lyon), Philippe Poutou (NPA). La Fédération Anarchiste NPA 69, le NPA Jeunes Lyon, l’Union syndicales solidaires (Alsace, 11, 12, 31, 34, 45, 53, 73, 85), Sud Education 85, Squat Notara 26, le Groupe Rouvikonas et l’Association Table Rase ont également signé. Parmi les signataires se trouvent aussi Thomas Dossu et Muriel Ressiguier.
Certains artistes ont également signé ces tribunes de soutien : Sylvain Creuzevault, Alessandro Di Giuseppe, David Dufresne, Thierry Guilabert, Dominique Grange, Aurore Koechlin, Eloise Lebourg, Maguy Marin, Stéphane Mercurio, Yves Pages, Charles Pennequin, Serge Quadruppani, Jean-Jacques Rue, Tardi, Françoise Verges, Maud Youlountas, Yannis Youlountas, Adam l'Ancien, Virginie Despentes, Christian Leduc, Jean-Pierre Levaray, Aymeric Lompret, Xavier Mathieu, Frédéric Paulin, Tancrede Ramonet, Saïdou (Sidi Wacho), Skalpel, Sid, Pedro Vianna. Parmi les artistes qui soutiennent la GALE, on peut également citer Médine. S’il n’a signé aucune des deux tribunes, le drapeau de la GALE a été brandi lors de l’un de ses concerts, le 8 octobre 2022.
Pour rassembler ses soutiens, la GALE semble avoir créé une page Facebook nommée « comité de soutien aux inculpés du 23.09 ». Cette date correspond à celle de l’arrestation des sept membres de la GALE pour la bagarre avec Civitas lors d’une manifestation anti-pass. La page Facebook recense les manifestations de soutien et a ainsi appelé à manifester pour soutenir un militant de la GALE en procès pour sa participation au murage du Bastion Social, sans oublier un rassemblement contre la dissolution. La page relayait à cette occasion une tribune publiée sur le blog de Mediapart, ainsi qu’une cagnotte créée par la GALE pour faire face à ses frais de justice. La GALE se sert également de cette page pour tenir ses soutiens au courant de ses déboires judiciaires : on y trouve un post écrivant « nous avons rdv le 11 mai devant le conseil d’état (sic). »
On peut enfin citer les groupes musicaux présents au Lyon Antifa Fest, co-organisé par la GALE. S’y trouvent Casey, La scred connection, Billie Brelok, 8°8 Crew, Los Tres Puntos, Les Sheriffs, Zone infinie, Burning Heads, Tagada Jones, la Brigada Flores Magon. Ce festival se tient d’ordinaire dans une salle du CCO, salle subventionnée par la région Auvergne-Rhône-Alpes.
La GALE dans la galaxie d’extrême gauche
La GALE n’a cependant pas la sympathie de la majorité des divers groupes d’extrême-gauche. Son usage quasi-systématique de la violence, son refus des institutions, sa haine viscérale de la police et son refus du compromis la séparent des syndicats, des partis politiques et d’un certain nombre de groupes d’extrême gauche comme le CV69, devenu par la suite Fermons les locaux fascistes. En 2018, lorsque la Jeune Garde se crée, elle affirme qu’il n’y a eu dans les années précédentes aucune réponse à l’extrême droite à Lyon. La GALE, qui existe depuis cinq ans alors, ne digèrera pas ce mépris et en viendra même à se battre contre ses rivaux antifas. Les groupes féministes leur reprochent également certains penchants masculinistes et virilistes. Autrement dit, les militants de la GALE ont du mal à s’effacer devant les femmes.
La GALE dissoute, et après ?
Le 9 novembre 2023, la GALE est définitivement dissoute. Dire que le groupe a disparu serait pourtant présomptueux. La sortie du livre d’Olivier Minot, Fragments d’une lutte antifasciste, lui permet d’être en tournée dans plusieurs villes de France. Le compte X de l’organisation antifa est également toujours actif et particulièrement prolixe. On y trouve du soutien à la Palestine, des avertissements à « Ceux et celles qui ont participé au génocide, par choix ou par manque de courage » et qui « devront payer ». La GALE affirme même que « Nous ne sommes pas dissous, sauf dans les fantasmes de @GDarmanin et @BrunoRetailleau. Nous sommes partout. Le combat continue. » Autrement dit, la GALE, dissoute, se permet non seulement de publier, mais aussi d’interpeler directement des ministres supposés faire appliquer cette dissolution. Une audace qui montre combien molle est la dissolution opérée par le gouvernement à grands renforts de communication. La GALE se permet également de soutenir Rima Hassan, qui ne semble pas s’en offusquer, bien qu’en l’occurrence en n’en attende pas moins, ou plutôt pas plus, du député européen. Outre ces prises de position publiques, la GALE continue enfin à s’investir dans l’édition 2024 du Lyon antifa Fest en communiquant sur les événements qui s’y tiendront.
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Malgré la dissolution de la GALE, tout ce petit monde continue d’organiser le Lyon Antifa Fest et d’animer ce festival de musique antifa comme si de rien n’était. Officiellement, l’organisation n’est pas assurée par la GALE, mais derrière, ce sont bien des militants de la GALE, avec Axel Festas et sa femme Safiya Bajja, notamment.
En plus d’avoir des réseaux sociaux toujours actifs et d'organiser le Lyon Antifa Fest, la GALE s’est renouvelée en février 2024 avec le groupe antifa autonome « Lyon Antifa ». Autrement dit, on prend les mêmes et on recommence. Pour l'heure, l’État n'a pas engagé de procédure pour reconstitution de ligue dissoute.
Chronologie
2013 : fondation de la GALE
Juin 2014 : deux militants de la GALE agressent deux personnes identifiées comme d’extrême droite – dont Damien Rieu – en marge d’un match de football.
10 avril 2018 : dix militants murent le local du Bastion social, dissout en 2019. Bagarre entre la GALE et le GUD (devenu Bastion social)
13 novembre 2018 : perquisitions des domiciles de six suspects du murage.
21 et 22 mai 2020 : la GALE revendique l’attaque d’un local associatif
16 janvier 2021 : la GALE vandalise des agences bancaires et affronte les forces de l’ordre pendant la marche des libertés de Lyon
7 février 2021 : agression contre des militants de l'Action française qui prenaient un verre sur les quais
3 avril 2021 : la GALE participe a une manifestation contre les dégradations contre la librairie « La Plume Noire », la police est prise à parti – rixe entre les communautés turques et kurdes
4 avril 2021 : la GALE prend part à une manifestation non-déclarée en soutien aux kurdes, les manifestants saccagent un commerce turc
24 avril 2021 : la GALE vole ses vêtements à un jeune
1er mai 2021 : heurts entre la GALE et la CGT Livreurs dans un cortège de sans-papiers. 27 policiers sont blessés.
14 juillet 2021 : vol d’une casquette avec violence sur un jeune présenté comme Augustin, membre de l’Action française, qui ne reconnaîtra pas cette identité
21 août 2021 : agression lors d’une manifestation anti-pass
28 août 2021 : bagarre entre la GALE et Civitas pendant une manifestation anti-pass sanitaire, la GALE se bat contre la police
30 août 2021 : poursuite d’un jeune dans le quartier de la Guillotière
4 septembre 2021 : la GALE se bat contre la police lors d’une manifestation anti-pass
23 septembre 2021 : interpellation des sept membres de la GALE ayant agressé trois membres de Civitas
4 novembre 2021 : jugement de sept militants de la GALE pour l’agression contre Civitas. Trois relaxes, quatre amendes
24 novembre 2021 : violences urbaines à l’occasion de la venue de Jordan Bardella dans le quartier de la Guillotière avec CNews.
10 & 11 décembre 2021 : Antifa Fest à Lyon, dont la GALE est co-organisateur. On y tient des propos anti-police.
3 janvier 2022 : campagne d’affichage anti-police maquillant les policiers en membres du Ku-Klux-Klan.
19 janvier 2022 : la GALE lance un « ultimatum géant » à Bayer, groupe pharmaceutique et agroalimentaire dont le siège est dans le 9e arrondissement de Lyon, en lui ordonnant de quitter la ville dans les 3 mois
29 janvier 2022 : mise en fuite de colleurs Reconquête
Mars 2022 : la GALE colle des affiches anti-police dans les 3e et 7e arrondissements.
10 mars 2022 : la GALE soutien sur Twitter les dégradations et violences commises en Corse.
15 mars 2022 : la GALE reçoit un courrier l’informant qu’elle est sous une procédure de dissolution.
25 mars 2022 : réponse des avocats de la GALE, qui considèrent que « la procédure se fonde sur des lectures partiales ou des interprétations erronées voire volontairement mensongères »
26 mars 2022 : manifestation contre la dissolution de la GALE
30 mars 2022 : décret de dissolution contre la Gale en Conseil des ministres, annoncé le 31 mars.
3 avril 2022 : interruption d’un collage Reconquête
6 avril 2022 : La Gale saisit le Conseil d’Etat par un référé-liberté
8 avril : interruption d’un tractage Reconquête
16 avril 2022 : agression sur un militant de la Jeune Garde, occasionnant 5 jours d’ITT
17 avril 2022 : menace au couteau de militants de la Jeune Garde
1er mai 2022 : bagarre entre la Jeune Garde et la GALE
16 mai 2022 : le Conseil d’Etat suspend la dissolution (29 avril 2022 : annulation de la dissolution des Comités Palestine vaincra et Action Palestine). La décision est renvoyée au 27 octobre 2023.
31 mai 2023 : interruption d’un tractage Reconquête, pillage des tracts
26 octobre 2023 : procès de la Gale pour le murage d’un local d’extrême-droite à Lyon
27 octobre 2023 : la dissolution de la Gale va devant le Conseil d’Etat
9 novembre 2023 : le Conseil d’Etat entérine la dissolution de la GALE. Elle annonce saisir la Cour européenne des droits de l’homme.
17 octobre 2024 : avec la Jeune Garde, la GALE organise une manifestation pro-Palestine dans les locaux de Sciences Po.